Entre les espaces : le storytelling interstitiel
Capter l'attention et fédérer les gens à travers les réseaux sociaux repose sur une nouvelle écriture, entre fiction et vivance.
65ème édition de cette newsletter autour de mon essai “Réseaux sociaux : une communauté de vie” ! Merci à vous d’être toujours plus nombreux, n’hésitez pas à la partager ! (et si vous préférez la lire en anglais, c’est par ici).
Le storytelling est une pratique fondamentale dans nos mondes numériques. D’abord parce que la frontière entre fiction et réalité devient de plus en plus ténue, portée par de nouvelles représentations de nos identités à travers les réseaux sociaux. Et également car tout devient mercantile et culturel. Pour un quart de la planète - les Gen Z - le shopping est une de leurs activités favorites pour se divertir (devant les jeux vidéos) et surtout socialiser, se construire également. Pas étonnant que des groupes comme Kering ou LVMH investissent tant dans l’industrie de l’entertainment. Il faut fabriquer une machine à rêves, à travers de nouveaux outils.
Créer de l’attachement dans les réseaux sociaux en suscitant l’attente du prochain épisode
On peut détester le goût de certains biscuits, ou la forme d’un sac. On peut moins apprécier une chanson d’un artiste. Néanmoins, quand on aime une boutique, un café, un musicien, ou une marque c’est souvent à une histoire globale à laquelle nous nous attachons dans les réseaux sociaux. Nous pardonnons certains écueils au profit d’une appréciation plus large du récit.
Des codes, des habitudes, des repères tant à la fois confortables, attendus, et qui permettent cependant des éléments de surprise dans notre quotidien. De l’attachement qui naît d’un storytelling plus fragmenté, polymorphe, et qui fait surgir de véritables sentiments, de l’attachement, les fameuses relations parasociales.
Comme dans une série que nous streamons, c’est l’épisode suivant que nous attendons dans les réseaux sociaux, des fragments qui appartiennent à un tout, et qui pourtant peuvent être librement interprétés, remixés et compris de façon isolée.
Le storytelling interstitiel, nerf de la guerre de l’attention
parle dans son dernier post “Culture GPT” de storytelling interstitiel :“Les histoires de marque sont aujourd'hui mieux racontées à travers le storytelling interstitiel, qui fait référence à une série d’éléments connectés dans une toile d'un récit plus large. Une histoire est racontée sous forme de série, chaque élément de contenu contenant les germes de l'histoire suivante et se terminant par un cliffhanger. Pour les marques de vente au détail, cela signifie publier des collections comme des films, en commençant par des teasers, puis des bandes-annonces, puis des activations marketing, avec pour rôle de susciter l'anticipation pour la sortie d'une collection, plutôt que de faire la promotion d'une collection une fois qu'elle est disponible.”
Ana Andjelic
En d’autres termes : les contenus autour des récits qui impactent les gens sont ceux qui parviennent à s’immiscer entre différents espaces culturels, tout en étant porteurs de marqueurs distinctifs clairs, comme un code visuel (le Tiffany Blue).
Les écrits de Pietro Terzini partagés quotidiennement sur Instagram sont à la croisée du poétique, du meme, de situations qui vont nous interpeler. Ils sont à cheval entre différents centres d’intérêts et moments qui comptent, ce qui leur donnent une force importante pour être partagés, sans pour autant s’éloigner d’une ligne directrice. Nous savons ce que nous allons trouver sur son Insta, ce qui crée paradoxalement les conditions pour que nous ne puissions cesser d’être surpris par ses fulgurances.
analyse que les routines beauté partagées sur les réseaux sociaux sont devenues un bruit de fond pour les créateurs de contenus afin d’exprimer leurs émotions profondes, des interrogations sur leurs relations aux autres. En somme un nouveau confessionnal pour raconter nos histoires.Autre exemple : le groupe NewJeans met en avant MINJI dans des contextes détonnants : épisodes YouTube où sont partagées les activités du phénomène musical durant leurs jours de “repos” comme cette découverte du tir à l’arc.
Ces espaces narratifs interstitiels ont 2 avantages :
faire raconter un autre type d’histoire et susciter de la conversation en ligne
jouer avec les algorithmes en faisant émerger ces contenus dans d’innombrables feeds des utilisateurs en fonction de centres d’intérêt hyper précis
Dans les réseaux sociaux, on écrit et on s’écrit, en somme.
Le chiffre de la semaine : $315M EMV
D’après Karla Otto et Lefty, les influenceurs présents lors de la dernière Fashion Week parisienne auraient généré l’équivalent de 315 millions de dollars en termes d’exposition médiatique (EMV) pour les marques rien qu’à travers leurs posts Instagram. La mode ! La mode ! La mode !
Les liens épatants
Helen Lewis résume l’indécence dans les réseaux sociaux à travers le cas de Kate Middleton, qui prouve que la culture de l’entertainment à tout prix conduit à des dérives. À lire chez The Atlantic.
Les équipes d’Infobip livrent leurs tendances 2024 s’agissant des messageries instantanées.
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