Ces dernières semaines, les travaux des sociologues Donald Horton et Richard Wohl autour des “relations parasociales” (1956, Psychiatry Journal) ont explosé dans les recherches en ligne. Le principe : les membres d’un public, les audiences, peuvent ressentir et développer une relation psychologique avec des artistes, des performers, des célébrités, que ce soit dans des fictions pures (par exemple une série) ou des mises en scène comme dans les talk-shows.
Ce qui était clairement à sens unique à l’ère pré-internet se trouble avec les réseaux sociaux. Illusion de la proximité ? Pas totalement : le fait que les personnalités se retrouvent à exister au milieu d’un flux de contenus d’amis, de proches, a tendance à amener effectivement une partie de l’identité de la personne en face d’autres gens. Les indices de vivance (dont on parle dans l’essai) donnent chair à ce qui était autrefois relativement lointain : les notifications, la possibilité d’interagir de façon permanente, et surtout fréquente, font de ces relations parasociales des habitudes bien réelles pour les individus.
“Ne confondons pas existence et ligne éditoriale”
Etienne Dorsay
Les récentes annonces de ChatGPT vont sans doute accélérer cet attrait pour les êtres fictionnels : il y a encore 6 mois, il était compliqué d’envisager de reproduire de façon automatisée en ligne la nuance dans les conversations interpersonnelles dans les messageries privées, de véhiculer des émotions, ou une granularité de sentiments.
GPT-4 va offrir 100 trillions de paramètres à ses utilisateurs. Pour bien se rendre compte : 130 000 000 000 000. De quoi travailler des modèles linguistiques colossaux, nuancés, addictifs. Des perspectives qui peuvent être apocalyptiques versions M3GAN, ou au contraire représenter un espoir notamment pour inclure des personnes exclues des systèmes de socialisation. Le choix est à nous.
Pour citer Etienne Dorsay, génial hommage de Gérald Arno au personage éponyme incarné par Jean Rochefort “ne confondons pas existence et ligne éditoriale”.
L’expression du jour : low-code
Avec ChatGPT, l’expression “low code” a explosé dans les médias. Ce que ça signifie ? Permettre la création d’applications (web, mobiles etc.) ou automatiser des processus sans être un génie de la programmation informatique. Une tendance de fond puisque selon Gartner, 70 % des nouvelles applications développées par les entreprises utiliseront ces technologies en 2025, contre moins de 25 % en 2020.
Les liens épatants
Une enquête passionnante du Pew Research Center sur les 13-17 ans américains sur le cyber-harcèlement a été révélée en décembre dernier. Entre autres conclusions socio-démographiques : les adolescents qui passent plus de temps en ligne sont aussi ceux qui sont les plus enclins à être victimes de cyber-harcèlement, mais également à connaître plusieurs formes de cyber-harcèlement.
L’attention devient de plus en plus rare : selon Dr Gloria Mark (University of California, Irvine), nous ne sommes pas capables de nous concentrer devant un écran plus de 47 secondes de suite en moyenne, contre 75 secondes en 2012. Un des remèdes selon elle ? Bingo : la lecture intense sur support papier. Suivons donc l’adage de Sylvie Grateau dans Emily in Paris (saison 3) en réponse à son jeune amoureux :
“Qui lit encore la presse écrite de nos jours ?”
”Tous ceux qui comptent à Paris!”
Evidemment.
À bientôt !
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