Fonctions d'élite
Avoir accès à certaines fonctionnalités exclusives dans les réseaux sociaux est un marqueur de pouvoir. Billie Eilish et Taylor Swift ont su de nouveau surprendre leurs fans.
Cette semaine, nous explorons comment la pop culture joue et se joue des fonctionnalités des réseaux sociaux (et vous pouvez lire cette lettre en anglais par là).
Billie Eilish, ou encore Taylor Swift ont affolé leurs fans ces dernières semaines. Les deux superstars ont en effet pu jouer avec certaines fonctionnalités d’Instagram afin de surprendre leurs larges communautés. L’accès à des fonctionnalités exclusives permet de générer une attention toujours plus grande. En permettant aux stars d’être à la fois si proches…et si lointaines.
Tous ‘amis proches’ avec Billie Eilish : donner c’est donner (et reprendre, c’est voler ?)
Dans le cadre de la promotion de son nouvel album, Billie Eilish a soudainement ajouté sa centaine de millions d’abonnés à un groupe d’ “amis proches” sur Instagram. Une fonctionnalité ouverte à tous qui permet normalement de partager des contenus plus privés ou exclusifs avec des personnes de confiance. Une forme de Graal qui valide l’importance auprès d’un utilisateur auprès d’un autre individu. Sauf que cette fois-ci, la fonctionnalité est détournée tout en faisant la promotion des valeurs de l’artiste.
Un effet de surprise pour les utilisateurs qui ont vu la story avec la petite étoile sur fond vert.
Cette tactique semble avoir fonctionné puisque l’artiste a attiré plusieurs millions de nouveaux abonnés en quelques jours. Néanmoins, une petite déception s’est faite sentir la semaine suivante puisque les millions d’amis proches ont ensuite été rétrogradés au simple rang d’abonnés (ou de copycat) les jours suivants.
Ne fait pas partie de l’élite qui veut.
Taylor Swift : la force des Easter Eggs.
Les Easter Eggs - ces fonction cachées au sein d'un programme ou d’un jeu vidéo - sont toujours aussi prisés. Ils sont débloqués grâce à une combinaison d’actions secretes (ou par des codes).
Le but : parvenir à recréer les conditions pour se laisser surprendre par la beauté des choses, notamment derrière les écrans. Une technique qui semble s’être accélérée ces dernières semaines afin de créer des décrochages, des disruptions, dans l’expérience ordinaire des réseaux sociaux.
Dès lundi 5 avril, les fans ont pu se rendre sur le compte Instagram de Taylor Swift. En swipant vers le bas, un compte à rebours jusqu'à la sortie de l'album apparaissait et incitait les Swifties à suivre la superstar sur Threads, où deux autres Easter Eggs étaient également cachés. Un effet de brillance spécial était débloqué sur les conversations taguées #TTPD, #The Tortured Poets Department, #Tortured Poets, #TSTTPD, #Swifties ou #Taylor Swift sur Threads. Des cœurs de célébration apparaissaient à l'écran lorsque quelqu'un "aime" un message qui comporte l'un des hashtags mentionnés ci-dessus.
Instagram a mis à disposition une fonctionnalité unique pour Taylor Swift, qui représente une petite prouesse technologique, et bien plus qu’un hack.
Une manière de valoriser les utilisateurs de ces réseaux, en leur donnant un petit quelque chose en plus. Tout comme sur TikTok.
L’avatar de Rihanna : RIP Rhenna ?
La photo de profil sur les réseaux sociaux est également un élément important de nos identités connectées. Sans nouvelle fonctionnalité, ou “hack”, elle peut devenir un véritable symbole ou artefact, car elle véhicule en un instant ce qu’une personnalité souhaite véhiculer.
En 2014, Rihanna dévoilait un petit dessin la représentant sur son compte Instagram. Un avatar - baptisé Rhenna - qui a tenu 10 ans. 10 ans pendant lesquelles Rhenna est apparue dans le feed de centaines de millions d’abonnés, de façon continue, véritable jingle visuel.
Sa photo de profil a été remplacée il y a quelques jours par un produit Fenty.
Une tragédie pour les fans de RiRi alors que Rhenna, véritable alter-égo de Rihanna, a accompagné l’artiste à travers de nombreuses collaborations et a été remixée des millions de fois au gré de son histoire. Une preuve de la force de la culture meme, qui n’est pas seulement un code culturel basé sur l’humour mais un outil qui sert à construire un contrat de lecture avec une communauté. Et donc de l’attachement.
À voir s’il s’agit d’un changement temporaire qui donnera encore plus de force au retour de Rhenna. Na-na-na, come on!
Donner c’est donner (et partager, c’est ok)
Les personnalités publiques ne sont pas les seules à détourner ou “hacker” certaines fonctionnalités social media. En jouant avec un certain élitisme. Le New York Times offre par exemple à ses abonnés la possibilité de partager 10 articles à des personnes non abonnées. Une façon de donner une monnaie sociale aux lecteurs (et de détourner un usage problématique : sauver ou partager en .pdf des articles payants).
Des signes intéressants que les plateformes sont moins rigides qu’auparavant sur leurs règles tout en ajoutant des couches sociales (donc une profondeur dans l’expérience ainsi qu’une hiérarchie). En outillant l’élite des réseaux, les plateformes pourraient recréer de la désirabilité.
Le chiffre de la semaine : 44%
D’après Google et Ipsos, 44% des adultes interrogés (âgés de 18 à 44 ans) ont participé à un meme pendant les 12 derniers mois. Remix, pop culture et réseaux sociaux : un cocktail qui va encore s’accélérer.
Les liens épatants
TikTok aurait changé les Etats-Unis. À lire du côté du NY Times.
Opioïdes à vendre dans les réseaux sociaux : c’est l’enquête édifiante de la BBC à regarder d’urgence.
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