Pas le time (mais l'envie)

Le temps passé moyen en ligne a atteint un plateau, alors que toutes les plateformes sont en train de mettre en place des stratégies de vivance.

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On ne peut pas passer plus de temps en ligne que ce que nos vies - et nos contraintes physiques - ne nous y autorise. C’est une des conclusions du rapport de GWI en 2022 qui prouve que nous avons atteint un plateau en termes de temps passé moyen sur internet après les pics des différents confinements.

Ce qui explique pourquoi différentes plateformes nous poussent à nous connecter tous les jours - même de façon très éphémère - afin de maintenir notre attention avec elles : à défaut d’augmenter le temps passé mensuel, augmenter la fréquence de check-in (l’action qui dit qu’on s’est effectivement enregistrés ou rendus sur l’application) est devenu la priorité. C’est même le fondement de BeReal (un laps de temps court, quotidien, pour poster une photo en dual camera), ou la force de Co-Star (un flash astro tous les matins) : comme la météo ou le JT avant eux, les réseaux sociaux ont besoin de rituels pour exister, véritables jingles numériques qui distribuent les bons points aux utilisateurs.

Capture d’écran de Co-Star la nuit dernière.

C’est probablement un bouleversement pour quiconque s’aventure dans la jungle du web ; il devient plus important de parvenir à faire répéter des actions plutôt qu’à se battre uniquement pour plus de temps passé sur une application. Car la répétition donne naissance à une familiarité, à une forme d’habitude, qui permet même de créer une certaine attente. À ce sujet, rien de nouveau conceptuellement depuis le film Inception.

“Qu'y a-t-il de plus résistant comme parasite ? Une bactérie ? un virus ? un ver solitaire ? Une idée ! Plus résistante et contagieuse. Une fois que l'idée s'est installée dans l'esprit, il est presque impossible de l'éradiquer. Une idée arrivée à maturité à intelligibilité, elle s'enracine là-dedans. Quelque part.” Inception

(Paragraphe plein d’acronymes ci-dessous, je m’en excuse).

Cet attrait pour la fréquence de “check-ins” génère l’appétit des investisseurs du côté des NFTs (Non Fungible Tokens). Les POAPs (Proof of Attendance Protocol) commencent à être distribués, par exemple pour attester de la participation à un événement. Une sorte de jeton-mémoire qui peut jouer le rôle de passeport obligatoire pour avoir accès à d’autres types de contenus ou d’autres invitations. De la vivance enregistrée et enregistrable.

(fin du paragraphe plein d’acronymes, Poète, vos papiers !).

Le mot du jour : skeuomorphisme

Le skeuomorphisme “consiste à imiter l’apparence d’un objet réel lors de la conception d’un objet virtuel”. En pratique, cette technique permet de faciliter l’action ou l’utilisation souhaitée par un utilisateur. La corbeille, sur le bureau des écrans d’ordinateur, est l’exemple le plus parlant : comme dans le monde réel, on peut déposer des documents dedans avant de s’en débarrasser. Sauf que dans les mondes virtuels, cette technique de design semble être une fausse bonne idée : reproduire les contraintes physiques dans des univers plus immersifs pourrait au contraire rendre l’expérience agaçante (par exemple dans le cas d’une boutique où chaque vêtement serait plié). Les créatifs ont des heures de réflexion devant eux !

Les liens épatants

Une analyse de l’impact des YouTubers locaux sur le marché Chandni Chowk à proximité de la gare d'Old Delhi en Inde prouve le pouvoir de prescription de ces guides des temps modernes qui créent également de nouveaux circuits économiques avec des boutiques qui jusqu’à présent ne faisaient pas de marketing.

Le New Statesman s’interroge sur l’explosion des contenus créés par des thérapeutes sur les réseaux sociaux; avec la course à l’audience, les messages véhiculés pourraient bien desservir les patients et poser des questions d’ordre éthique.

…à bientôt !