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Du fait de nos usages numériques, le syndrome de la vibration fantôme est en pleine explosion. Ces hallucinations légères, anecdotiques à première vue, trahissent une surcharge de notre système attentionnel, qui réagit physiquement à notre vie numérique.
Le corps anticipe la notification à venir sur notre smarpthone. Il la devine, il l’imagine, il finit même par la produire de lui-même.
Une vivance incarnée entre membre fantôme et esprit captif
La vivance numérique - la qualité ou l’état d’être en vie au travers de nos usages connectés - n’opère pas uniquement dans le monde des idées, bien au contraire. À force d’usages numériques permanents qui mélangent esprit, smartphone, identité numérique et monde physique, nous évoluons dans une nouvelle dimension où le cerveau ressent de plus en plus fortement ce qui se passe à travers nos écrans. Ce ne sont pas que des émotions : c’est une sensorialité entière qui s’y déploie. L’attente d’un message devient tension musculaire. L’incertitude d’une réponse produit une micro-anxiété corporelle. Notre rapport aux autres, médié par les applications, affecte nos nerfs, notre peau, notre respiration.
Ces fausses alertes tactiles ou sonores ont un nom : phantom vibration syndrome ou phantom ringing. Elles concernent une large majorité des utilisateurs intensifs de smartphones.
D’après Robert Rosenberger (Georgia Tech), il faut faire un parallèle avec les lunettes de vue. À force de les porter, la personne oublie qu’elle les a sur le nez. Elles deviennent une extension invisible du corps. Idem donc pour le smartphone : il devient un membre fantôme, à travers duquel des sensations peuvent naître ou se prolonger. À tel point que même un smartphone perdu peut continuer à être ressenti par son propriétaire, un phénomène bien connu depuis Ambroise Paré au XVIème siècle qui constatait que des patients dont les membres étaient amputés continuaient à éprouver des douleurs alors que ceux-ci étaient désormais absents. Ce que nous vivons aujourd’hui, c’est une version technologique de ce phénomène : un deuil impossible d’un appareil toujours là.
Attention colonisée ?
Ces hallucinations ne sont pas des bugs. Ce sont les micro-symptômes d’un dérèglement plus vaste : celui d’un esprit saturé, en hypervigilance constante. Une attention fragmentée, morcelée par les injonctions à répondre, réagir, scroller. Lorsque plus rien ne vient, c’est notre propre cerveau qui invente l’alerte. Pour remplir le silence. Pour combler l’attente. Notre cerveau n’est pas fou : il réagit à une corporéité qu’il estime comme étant normale
La notification devient alors un spectre. Une illusion tactile. Un fantôme algorithmique.
Peut-on se défaire de ces fantômes ? Suffit-il de couper les notifications, ou de passer en mode avion ? Pas vraiment. Ce qu’elles révèlent, c’est notre degré de fusion avec la machine. Ce n’est pas une addiction au téléphone, mais une transformation de notre rapport au monde. De notre manière de percevoir, d’habiter le présent, de ressentir notre propre corps.
Ces fausses vibrations, ce ne sont pas des erreurs. Ce sont des messages. De notre système nerveux. De notre fatigue. De notre besoin de se déconnecter – mais aussi de recomposer une attention plus libre.
Le chiffre de la semaine : +41%
D’après Google, les marques qui développent un tone of voice à forte personnalité ont une désirabilité supérieure de 41 points.
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