J’adore ce mot allemand - Fernweh - qui décrit cette sorte de “mal du lointain”, un désir de quitter le familier mais également cette douloureuse sensation de ne pouvoir satisfaire ce qui pourrait se passer ailleurs. L’exact opposé du mal du pays en somme.
Ce Fernweh fait partie intégrante de l’expérience qu’on peut avoir dans des mondes plus immersifs. Dans les jeux vidéos, quiconque a joué à Zelda a forcément voulu un jour aller jusqu’au bout d’une carte accessible, ou tenter de traverser les maps.
L’étymologie de ce mot a son importance pour les univers numériques en gestation (et les réseaux sociaux) ; le Fernweh est né d’une volonté de casser les rigidités et les ordres établis, ou pour reprendre le personnage Mignon de Goethe dans la nouvelle “Les Années d’apprentissage de Wilhelm Meister” en 1795 : souhaiter aller vers le “Land wo die Zitronen blühen”, '“le pays où les citrons fleurissent”.
Or c’est bien là tout l’enjeu en ligne : donner à la fois des formes de règles du jeu (les actions que l’utilisateur peut mener, les cadres, les limites…) mais également définir les droits (les outils de création, les endroits où l’utilisateur n’est pas modéré…). Cet équilibre subtil explique probablement pourquoi des univers moins beaux esthétiquement comme Roblox (ou même Reddit) génèrent une participation incroyable en comparaison à des univers comme Decentraland. Ce qui compte, c’est d’abord ce qui se passe dans l’esprit des gens, pas tant ce qui se passe à l’écran.
Cette envie de “casser” les espaces se retrouve dans tous les réseaux sociaux : des fonctionnalités comme le fameux “poke” de Facebook avaient donné naissance à de nouvelles façons d’interagir avec nos friends, voire à se lancer des challenges compulsifs. De la friction qui donne corps à un espace numérique.
Pas étonnant que le site “Wonder of Street View” soit aussi populaire ces derniers jours ; la promesse est simple : se retrouver au beau milieu d’une des centaines d’images de Google Street View. Et se retrouver enfin au milieu du lointain.
Le mot du jour : superfan
61% des jeunes nés à partir de 1995 se décrivent comme “super fans” ou “vraiment grands fans” de quelqu’un ou de quelque chose d’après Google. La conséquence : l’explosion des super fans professionnels qui développent des contenus pour les passionnés tout en créant une économie autour. L’influence n’a pas fini de se réinventer.
Les liens épatants
Kev 'm’a partagé un article fondamental de Anu Atluru pour comprendre la nouvelle génération de réseaux sociaux et d’application. Au coeur de sa réflexion : construire des rituels, pas seulement des habitudes. 5 critères : un rituel est intentionnel participatif; c’est signifiant émotionnellement (ie: nostalgique, drôle…); il est régulier; il est délimité de façon précise.
Loin d’être anecdotique, Aya Nakamura, sur le plateau de Quotidien de Yann Barthès, s’est exclamée “c’est la vivance”, en expliquant la liberté qu’elle ressent en ayant passé son permis de conduire.
L’expression est utilisée pour exprimer un état de kif tout en étant ancré dans quelque chose d’accessible justement (être au volant d’une voiture). Depuis, l’expression commence à apparaître de façon plus récurrente sur Twitter…
“Enfin ! La liberté ! Je ne sais pas comment je faisais avant pour prendre des Uber, mais là je suis dans ma voiture, j’ai mes placements, je fais ce que je veux (…) je mets la musique que je veux, c’est trop bien, c'est la vivance !
Aya Nakamura
Autopromo : j’ai pu développer la notion de vivance d’un point de vue marketing pour le magazine Stratégies.
…à bientôt ! (et très bientôt de belles interviews en vivance…). N’oubliez pas de partager, commenter, “liker” !
Merci pour ces réflexions et contenus très intéressants !
ooh je ne m'y attendais pas 🤗